• Petit Journal de Roland

    Ceci est un texte indépendant de mon histoire et n'en fait donc nullement parti. Son seul intérêt est de partir du point de vue d'un personnage secondaire, mais cela ne veut pas dire que ça n'apporte aucune information importante et/ou intéressante.

    Partie d'histoire concernée : Ereke
    Personnages principaux de la partie d'histoire : Coram, Methans, Vulcan
    Période du monde : Moyen-âge
    Nature du monde : Heroic-Fantasy

    ----------------

    Présentation de Roland

     

    Tout pue à Bokai. Les bestiaux, le fumier, les récoltes, les gens, ils puent tous. Ça pue dans tous les coins. Mon père pense que j'ai un problème parce qu'il ne se sent pas gêné par la puanteur, parce que personne ici ne sent gêné par la puanteur, mais c'est eux qui ont un problème. Un problème avec leur fichu nez. Ils n'ont aucun flair.

    Pas étonnant que ce maudit village ait fini par tomber en ruine avant l'arrivée de la fée Lethomas. Je ne l'aime pas celui-là. Monsieur est un bizarre, mais tous le monde lui lèche le cul vu qu'il a redonné vie au village. Maintenant, le gars se pavane à Bokai comme s'il était le Jarl et le pire, c'est que tous les villageois l'acclament et lui offrent des trucs, comme des prises de pêche ou des fruits. Ils sont tous pitoyables. Pas besoin d'être une lumière pour comprendre que si Lethomas ne faisait pas tourner le village avec ses contacts et sa fortune, on lui offrirait plutôt des jets de pierre. Des hypocrites. Mon père aussi.

    Je déteste ce village. J'ai envie de partir pour la cité, la ville du Jarl. J'ai envie d'être autre chose qu'un de ces fermiers puants. J'ai envisagé de devenir tavernier, mais bien sûr la seule taverne de ce maudit trou, c'est celle de Lethomas. Et comme il fallait s'y attendre, il a engagé son protégé, l'énergumène.

    "Tu as entendu ce que j'ai dit, Roland ?" Lethomas me fait sursauter.

    "Huh ?"

    "Bon sang, mon garçon ! Je sais que tu préférerais aller flâner, mais nous faisons cela pour aider ton père. Fais un effort !" Il a l'air déçu...  Peu importe.

    Tu me juges, hein, Lethomas ?

    Tu es là à essayer de m'apprendre les ficelles du fauchage facile, mais tu ne fais que me gonfler. J'en ai juste marre, alors autant le dire.

    "J'en ai ma claque. Désolé, Lethomas, mais je me taille."

    Je fous mes mains dans mes poches et je m'en vais. Je ne me retourne que brièvement pour voir Lethomas qui continue à faucher les plants tout seul, comme un idiot.

    Il y a quand même une chose de bien dans ce village puant bourré d'hypocrites. Pour moi, c'est une lumière qui éclaire chacune de mes journées, une créature divine qui me donne l'impression d'être plus qu'un gros bras sans cervelle. Elle a des cheveux dorés et des yeux qui pétillent toujours de curiosité. C'est Anabelle, la fille du Sieur Pertinax.

    J'ai très envie de la voir encore aujourd'hui. Nous avons beau vivre dans le même village, nous ne fréquentons pas réellement les mêmes coins. Autant j'aime les lieux calmes, loin de des gens, autant elle adore les lieux bruyants qu'elle qualifie "pleins de vie". Et puis, à mon plus grand malheur, il y a LE lieu où elle se rend le plus souvent : La cabane de l'énergumène.

    Mon plus grand malheur, ce n'est pas peu dire. Je l'aime cette fille, je l'aime comme un fou, et elle m'aime aussi... mais pas de la même façon. C'est lui qu'elle aime. Cet étranger. Ce type malsain qui revient souvent couvert de sang. C'est son âme-sœur, dit-elle. Je crois qu'à chaque fois qu'elle prononce ces mots, je me demande toujours si elle n'est pas tombée sur la tête. Et parfois, je me demande juste si l'énergumène ne lui a pas fait quelque chose pour qu'elle soit autant accrochée à lui. Sauf que ma deuxième théorie ne tiens pas la route. Ce type ne l'aime pas. Je crois même qu'il la déteste.

    J'ai vraiment envie de la voir.

    "Ro...LAND !" s'écrie une voix juste derrière moi. Je fais un sursaut horrible, j'ai honte.

    "Eulalie !?" J'aurais dû la voir arriver, ça l'amuse ce genre de blague."Tu pourrais t'abstenir de faire ça, j'ai cru que j'allais crever."

    Je suis vraiment fâché, mais elle me regarde avec son petit air innocent et je suis forcé de lâcher l'affaire. On commence à marcher tranquillement en direction du centre du village.

    "Tu es encore en train d'essayer d'espionner notre Anabelle adorée ?" Elle me dit ça avec un sourire machiavélique.

    "Heh ? Non, je ne l'ai même pas encore vu aujourd'hui !"

    "Tu vas avoir du mal à la voir alors. Elle y est encore allée." Eulalie fait, avec un faux air compatissant.

    "Ha..."

    C'est vrai. Je ne peux pas lutter.

    "Tu sais, je pense que si il continue à la remballer, elle finira par se lasser" C'est presque mignon comme elle essaie de me remonter le moral.

    "Si ça ne durait pas déjà depuis trois ans, j'aurais encore été tenté de te croire" Dis-je en soupirant.

    "C'est parce que c'est une fille persistante, mais je suis sûre qu'à moment donné, même elle passera à autre chose." Eulalie semble réfléchir sur quelque chose avant de reprendre. "Tu sais, en tant que fille, je ne comprends pas du tout ce qu'elle lui trouve. D'abord, il a un physique étrange et il est tout gris. En plus, il dit des choses qui font souvent froid dans le dos, et ça, c'est une chose que je n'aime vraiment pas chez lui. Mais le pire, c'est que s'il se moque de nous, mais il est particulièrement horrible avec elle."

    "Comme la fois de son anniversaire." Je prends directement parti.

    "Comme cette fois. Elle lui amène une part de son gâteau et lui qui jette ça à terre et met même le pied dessus. C'était cruel, j'avais de la peine pour Anabelle..."

    "J'aurais du mal à oublier, je lui ai même mis une patate après le départ d'Anabelle." J'avoue que cette partie me rendait moins fier que je l'aurais voulu. "Après coup, il s'est contenté de ricaner et il est simplement rentré chez lui."

    "Peut-être que c'est aussi un poltron qui ne sait pas se battre." fait Eulalie, en gloussant à moitié.

    "Tu essaies de persuader qui ?" Je grogne "Quand il est vraiment d'humeur, il n'a pas vraiment dur à me retourner comme si je n'étais rien. Et je ne parle pas des soulards qu'il latte à la taverne ou des gens qu'il a probablement buté en dehors du village."

    "Hey, j'essaie de lui trouver des failles, autres que le fait que c'est un gros enfoiré !"

    "Qui est un enfoiré ?" demande subitement une voix un tantinet rauque juste derrière nous.

    Mon sang se glace à la seconde où j'entends cette voix. Pourquoi il est derrière nous ? Pourquoi tous le monde arrive toujours par derrière aujourd'hui ? Mais surtout pourquoi a t-il fallu que lui arrive derrière moi ?

    Je me retourne avec Eulalie et il est là avec son petit sourire moqueur. Eulalie émet un petit glapissement et met sa main devant sa bouche. J'imagine que se faire surprendre par l'énergumène la stresse plus que moi. Je ne suis pas un froussard, il m'a surpris, mais il ne me fait pas peur.

    "Tu t'intéresses à ce que l'on dit maintenant ?" C'est moi qui prends la parole. Eulalie ose rarement dire quelque chose en sa présence.

    "De quoi parles-tu ? Je m'intéresse toujours à tout ce que vous pouvez dire." Il prend une expression blessée complètement stupide, mais je le connais, le bougre.

    "Ça fait combien de temps que tu es derrière nous à nous espionner ?" Je hausse un sourcil. Il n'y a pas moyen que je m'écrase devant lui.

    "Va savoir. Peut-être depuis que vous vous êtes rejoints ou alors quand vous avez commencé à parler de moi. J'aime bien écouter quand on parle de moi."

    "On parlait en mal de toi." Je fais remarquer.

    "Et alors ? Au moins, je sais que j'occupe vos pensées malgré tout." Il rigole. Qu'est ce qui l'amuse ? "Au fait, ce n'est pas fort aimable d'avoir abandonné Lethomas à ta tâche. Il t'a couvert auprès de ton père, mais je n'accepte pas qu'il se fasse passer un savon à cause d'un bon à rien."

    J'ai envie de répliquer, mais le regard qu'il me lance, en plus de ce sourire carnassier si typique chez lui, me file des sueurs froides. Je me racle la gorge, je dois dominer cette foutue conversation.

    "Il avait le choix de laisser tout ainsi. Il n'était même pas supposé venir m'aider, c'est lui qui a pris cette décision tout seul."

    Il semble... considérer ce que je viens de dire et il acquiesce simplement de la tête.

    "Je... vais aller de mon coté." S'exclame tout à coup Eulalie. Je l'avais complètement oubliée, la pauvre."Peut-être à plus tard, Roland !" et elle s'en va.

    L'énergumène la regarde partir avec un visage vide d'expression, avant de me dévisager à nouveau avec ce petit air mesquin qui m'énerve tant chez lui.

    "Elle est encore allée où, Anabelle ?"

    Sa question me prend de court. Il était donc bien là depuis le début de la conversation finalement. Comment cela se fait-il que l'on ne l'ait pas remarqué jusqu'à ce qu'il parle ?

    "À ton avis ?" Je lui réponds sarcastiquement. Il pousse un long soupir.

    "J'espérais que tu me sortes un lieu différent à celui que je soupçonne."

    C'est un truc qui me sidère toujours avec ce gars. C'est moche à dire, mais il n'a rien en rapport avec les gens du village. D'abord, il est malin, vraiment malin. Ensuite, il est franc, beaucoup trop même, comme s'il ne craignait pas choquer les gens. Mais après tout, nous parlons de l'énergumène. On dirait qu'il se fout de tout et que rien ne l'atteint. Ce n'est pas pour rien que les gens du village ont commencé à le surnommer "Sang-de-glace" et le pire, ou le plus comique, je ne saurais trop dire, c'est qu'il a adopté ce surnom comme si c'était un titre valorisant.

    J'imite son soupir.

    "Ravi de ne pas te faire plaisir" Je mens à moitié. Ça me désole de savoir qu'Anabelle est encore allée là-bas.

    Il me regarde brièvement et hausse les épaules. Je me dis que c'est le moment idéal pour une retraite.

    "J'ai à faire, donc si tu veux m'excuser." Je me détourne de lui et poursuis mon chemin. Ce n'est pas plus mal de se débarrasser de cette misère.

    Sauf que maintenant, je peux clairement l'entendre me suivre. J'avance un peu, fronce les sourcils et me retourne.

    "Après t'être amusé à nous écouter, tu me suis maintenant ?"

    "Ne te trouve pas si important." Il s'exclame du tac au tac, roulant des yeux "Tu sembles oublier que les maisons se trouvent toutes dans cette direction."

    J'ai très envie de me frapper le front pour le coup. Évidemment qu'il devait prendre le même pour rejoindre sa cabane. Ce serait bien de ma part si je ne me mettais pas tout seul dans l'embarras face à lui. Il franchit la petite distance qui nous sépare et me fait signe.

    "Puisque tu as l'air d'avoir besoin de compagnie, je vais me faire un plaisir de t'escorter."

    J'ai envie de grommeler, de l'insulter, de le frapper, peut-être même de m'échapper en courant pour ne pas avoir à faire la route avec lui, mais je sais déjà que c'est peine perdue. Rien ne l'atteint, il peut me latter sans problème s'il le veut malgré son petit gabarit. Et il pourrait prendre ma fuite pour un jeu. Et je n'ai surtout pas envie qu'il croie que je joue à un jeu avec lui. Je le vois bien jouer au renard et prendre des cibles comme si c'était des lapins... Je me suis fait suffisamment d'idées sur la provenance du sang qui le barbouillait quand il rentrait de certaines de ses "escapades". Je me contente donc de marcher à coté de lui sans rien dire et curieusement, il ne dit rien non plus. Il se contente de marcher avec moi comme si c'était la chose la plus normale au monde.

    Il y a beaucoup de chose que je déteste dans ce village, les gens, l'odeur, le travail dégradant, mais lui, je peux dire que je le hais. Premièrement, il me vole Anabelle. Même s'il la rejette, elle ne se préoccupe toujours que de lui. Deuxièmement, il a tout d'un démon. Ça n'est inconnu à personne ici qu'il a un attrait tordu pour le sang. Comme un vampire. Sauf qu'on ignore s'il en boit. On se contente de le tolérer parce que personne ne veut offenser Lethomas. Oui, contrairement à Lethomas qui est encore apprécié, tous le monde ici déteste autant l'énergumène que moi. Enfin, presque tous le monde. Troisièmement, il me fait me sentir inférieur. Pas juste parce qu'Anabelle trouve qu'il irradie de je ne sais plus quoi, mais parce qu'il est trop intelligent et trop perspicace. Même s'il est plus petit que moi, moins musclé, il est plus fort que moi et plus rusé aussi. Et puis, peu importe ce qu'il tente, il est doué. Quoi que je fasse, il sera toujours meilleur que moi, parce que c'est comme ça, tout parait naturel pour lui. Ça me rend fou. Nous avons même le malheur de partager des avis communs, sauf que, bien sûr, il est capable d'exprimer complètement le pourquoi du comment de sa pensée, alors que moi, je me contente de juste trouver les choses "mauvaises".

    "Je sais que je suis une vraie merveille dans ce village, mais tu peux cesser de me fixer. Tu n'es pas vraiment mon type." Dit subitement l'énergumène, avec un petit air partagé entre la sincérité et la malice.

    Je me fige brutalement.

    "Haa ? Pourquoi tu crois que... Heeeh !? T'es pas mon type non plus, enfoiré ! En plus, t'es un mec. T'es vraiment pas normal !" Je sens mes joues rougir de consternation instantanément. Ce n'est pas la première fois qu'il me sort un truc du genre, mais ça me frustre à chaque fois. J'ai cru comprendre qu'il ne faisait pas vraiment de... différence entre les gens, mais je ne veux pas que... Je ne veux pas qu'il me mette dans le même sac que ses fréquentations, s'il a des fréquentations qui acceptent sa bizarrerie. "Et puis, au cas où tu n'aurais pas percuté, je suis intéressé par Anabelle, enfoiré."

    "Dommage que tu sois juste incapable de réveiller son intérêt." Il se moque. "Sinon ça, pas besoin de monter sur tes grands chevaux. Je veux juste faire la conversation."

    "T'es pas vraiment le genre de gars avec qui j'ai envie de discuter, je te signale." Je grogne avant de reprendre ma route.

    "Heureusement que tu me le dis, j'aurais eu du mal à m'en rendre compte tout seul." Génial. Maintenant, c'est lui qui fait de l'ironie.

    On atteint le centre du village, là où se tient le petit marché. Spécialisé en vente de poisson et autres horreurs toutes plus odorantes les unes que les autres. J'attrape la partie pendante de mon écharpe et l'enroule autour de mon nez.

    "Tu es un sensible, toi." Je hausse le sourcil à son commentaire. Je suis surpris de voir qu'il grimace aussi face à la puanteur. Sauf que lui bien sûr ne se cache pas de montrer son dégout aux gens alentour.

    "Tu peux parler." je chuchote dans mon écharpe, ravi de le voir ennuyé.

    "J'ai un bon nez. Évidemment que ça m'indispose" Il me rappelle, en haussant un sourcil."Tout le monde n'a pas votre niveau de tolérance quand il s'agit de mariner dans son propre jus toute la journée." Et il marque encore un point, même si ça m'agace qu'il me mette dans le même sac que les autres.

    On prend ensemble le chemin vers la sortie du village, tandis que je me libère le visage de ma longue écharpe.

    "Qui suit qui maintenant ?" Il me fait remarquer.

    "Tu comptes contourner ta cabane, non ? Je vais simplement prévenir Anabelle que tu t'es barré pour l'éviter."

    "Keh, c'est toujours étrange de voir quelqu'un comme toi avoir des éclairs de génie."

    "Tu serais surpris." Je lui rétorque, non sans me sentir assez fier d'avoir tiré un compliment de l'énergumène. Du moins, ce qui s'apparentait à un compliment.

    "Ce n'est pas toi qui me surprendra. Je sais déjà que tu es un poil au-dessus de la norme ici." Il me dit purement et simplement.

    Je m'arrête à nouveau, complètement abasourdi, mais lui continue son chemin, l'air de rien. Si ce n'était pas un compliment ça, je suis un bouffon.

    "Oy, Coram !" Je m'écrie. Il s'arrête et tourne vaguement la tête pour me faire comprendre qu'il m'écoute."Si tu n'étais pas dans mes pieds avec Anabelle, je pourrais presque t'apprécier."

    Il se retourne complètement pour me faire face et son sourire s'étire tellement que ça ressemble presque à une grimace. Je sens que je ne vais pas aimer ce qu'il va me sortir.

    "Tu veux dire : Si je n'étais pas dans tes pieds, si je n'étais pas différent de ce que tu considères comme normal et si je ne t'étais pas supérieur, non ?"

    Je le hais, cet énergumène.

    Roland et Coram

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